jeudi 30 juin 2011

Scènes de la vie ordinaire en entreprise et.... à l'Elysée















En ces temps de remaniement ministériel rendu obligatoire par la nomination de Christine Lagarde à la tête du FMI, où un homme va la remplacer à la tête du Ministère des finances réduisant d'autant la place des femmes dans ce gouvernement ultra-conservateur, inégalitaire, foulant aux pieds les règles élémentaires de la parité, il n'est pas inutile d'insister sur la façon dont on ne pardonne jamais rien aux femmes, dont la compétence est toujours sujette à caution. Détail amusant : nous avons toutes entendu lors de la nomination de Mme Lagarde il y a trois ans à Bercy, les mêmes hommes, sempiternels piapiateurs commentateurs de l'actualité prétendre que Bercy était devenu au fil du temps un ministère mineur, inintéressant pour les carriéristes politiques mâles. Sous-texte : un ministère bien bon pour une bonne femme, dont la carrière serait forcément mineure, toujours traitée comme salaire d'appoint du ménage ! Curieusement, depuis ce matin, il est redevenu STRATEGIQUE puisque c'est désormais un homme qui l'occupe !

La discrimination des femmes dans les entreprises est rarement frontale, mais au contraire, sournoise, feutrée, elle s'exerce à bas bruit, à tel point que la plupart du temps elle est niée même par les femmes qui la subissent. L'anecdote qui suit est réellement arrivée il y a quelques mois dans une des entreprises où j'ai fait un passage : il s'agit d'un bureau d'études (BE) en mécanique et électronique -ou mécatronique. Dirigeants hommes : un mécanicien ENSAM et un électronicien, ingénieurs tous deux. Activités : Recherche et Développement (R&D) et sous-traitance -placement de techniciens et ingénieurs chez des clients industriels. Inutile de préciser que les femmes étaient cantonnées aux postes de secrétaire, comptable et chargée de recrutement, sans oublier la femme de ménage ! J'y suis ingénieure commerciale dans cette marée d'hommes au pouvoir.

Surprise, un jour de réunion je rencontre une jeune femme parmi les mécaniciens en sous-traitance ; elle est placée chez un des clients industriels du BE depuis 4 mois à la satisfaction de tous, client inclus. Son contrat s'arrêtant, on la replace illico chez un autre client, toujours comme mécanicienne. Là, les choses se gâtent : le nouveau client n'est pas du tout content de sa prestation au bout d'une quinzaine de jours et demande son remplacement. Qu'elle ait donné entière satisfaction durant sa première mission et qu'elle soit médiocre dans la seconde ne donne lieu à aucune interrogation ni aucune contre-enquête, on ne lui laissera pas une deuxième chance ! Le dirigeant du BE ne se pose pas plus de questions (ce genre de prestations est sujet à délits de sale gueule et à toutes sortes de pollutions culturelles et comportementales, un seul mécontent ne suffit évidemment pas à juger objectivement un cas !), il entame donc une procédure de licenciement. La procédure est très avancée (lettre recommandée, entretien, la mécanicienne se cherche un autre travail), quand surprise, le premier client repasse un ordre et ... redemande sa mécanicienne préférée ; mieux, il subordonne sa commande à la délégation de cette employée !

Cela ne la ne la sauvera pas : la procédure de licenciement est tellement avancée que le dirigeant ne souhaite pas l'arrêter. Il préfèrera alléguer une fausse explication au client, un mensonge : « sa » mécanicienne ne travaille plus pour le cabinet, sous-entendu bien sûr, de sa propre
initiative ! Il va falloir accepter quelqu'UN d'autre. Une de perdue, dix de retrouvES ! Et puis surtout, on reste entre hommes, les femmes, les clients n'en veulent pas, ne leur pardonnent rien, cooptons donc la médiocrité masculine ! La chargéE de recrutement s'est exécutée sans piper mot : elle a licencié la mécanicienne et s'est cherché UN mécanicien -et je vous assure que c'est un vrai boulot de patience. L'anecdote m'est arrivée aux oreilles par la secrétaire venue me la raconter un soir que son patron n'était pas là, en rasant les murs.

A l’Élysée, le Président de la République peine à aligner trois mots d'anglais, à Bercy une parfaite anglophone est remplacée par un ministre ne parlant pas l'anglais indispensable à ce poste, j'espère tout de même que le judoka machiste David Douillet lui, le parle l'anglais : mais j'y pense, ce n'est pas la peine, il est en charge d'un ministère aussi IMPORTANT qu'inutile : les français résidant à l'étranger. Et c'est les femmes que ces fucking monoglots (je parle de ceux en charge de défendre les intérêts du pays auprès des instances internationales) taxent d'incompétence ?

6 commentaires:

  1. C'est vraiment écoeurant ce qui est arrivé à cette mécanicienne. Je suppose que les hommes qui bossaient avec et autour d'elle devaient jubiler. Je suppose aussi qu'il s'était agi de l'UN de leurs mécaniciens, une mobilisation aurait émergé et les dirigeants auraient protégé l'employé.

    On n'en sort pas de cette haine viscérale.

    RépondreSupprimer
  2. Je fais souvent un constat dans les articles qui parlent d'une femme politique qui vient d'être nominée à un poste "stratégique". L'article détaille absolument tous ses diplômes, le fait qu'elle parle tant de langues, même les instruments de musique dont elles jouent ( à la perfection souvent). On sait donc que mme Lagarde et mme condoleeza rice jouent du piano.
    Parce qu'il faut absolument justifié le fait que ce soit une femme qui soit nommée par le fait qu'elle est vraiment très douée. Parce que ce n'est pas si évident. Alors que pour un homme si.
    Bien sûr les diplômes des hommes sont aussi évoqués mais dans les articles longs et de fond. Dans les articles courts, seul leur parcours est bien détaillé. Alors que pour les femmes on ajoute plein d'autres aspects. Le fait d'évoquer la musique est révélateur, il faut "adoucir" l'image des femmes fortes, les ramener toujours aux clichés. je ne pense pas que j'exagère ce constat vu je l'ai lu pour une femme politique américaine. Avez-vous jamais entendu parler des hobbies des autres secrétaires d'état américains?

    RépondreSupprimer
  3. Ce qui a de très drôle avec la nomination de mme Lagarde au Fmi, c'est que tout le monde salut une "victoire pour la France":
    - mme Lagarde n'aurait pas été nommée ministre de l'intérieur si elle n'avait pas fait une fabuleuse carrière aux Etats-Unis (alors que pour un homme suffit d'être le maire d'une petite ville française et de bien réseauter)
    - mme Lagarde aurait eu peu d'opportunités de faire une telle carrière en France
    - mme Lagarde a vu sa nomination adoubée par les autres pays, non pas grâce à son expérience française (ni même par le fait qu'elle soit française) mais bien pour son expérience et son réseau international.

    Et nos français bien chauvins en viennent à se persuader qu'ils sont trop fort d'avoir offert des opportunités à mme Lagarde, qu'ils sont supers féministes et que cela montre bien la puissance de la FRANCCEUUH (comment ça le FMI n'est pas sensé être une couverture qu'on tire à soi mais le travail consensuel de tous?)

    RépondreSupprimer
  4. Décidément ce n'est pas le métier avant tout qu'ils aiment mais leur misérable petite vanité masculine. On aurait pu croire qu'au-delà du sexe de la personne c'est l'intérêt commun qui primerait. Mais non. Ce qui n'augure rien de bon d'ailleurs pour l'avenir de la planète. On dirait que la devise de ces gens est "Le pouvoir aux mâles ou la mort".

    RépondreSupprimer
  5. @ Héloïse : je pense que s'il s'était agi d'un mecanicieN, ils auraient pesé le pour et le contre, qu'ils auraient cherché à comprendre et qu'ils auraient contre-argumenté ; pour une femme, ça n'en valait pas la peine, ils fonctionnent comme cela.
    @ Lyly : Tout à fait : cette "fauconne" de Condi Rice a excité au maximum leurs fantasmes ! Qu'est-ce qu'on n'a pas lu sur elle ! Qu'elle était célibataire car carriériste ratant sa "vie de fâme", sans enfant, le péché mortel, mais jouant parfaitement du piano ce qui devait adoucir son image. Effectivement Lagarde doit ses nominations successives à ses seuls talents, à sa parfaite maîtrise de l'Anglais et à son réseau international et américain. Il nous faut toujours en faire plus et nous sommes indiscutablement SURsélectionnnées, nous les femmes. Eux ne font que coopter leur médiocrité, et nos entreprises, collectivités et administrations en souffrent.
    @ Euterpe : leurs intérêts de genre priment avant l'intérêt général, on en a la preuve tous les jours, moi en tous cas, dans les entreprises où je passe.

    RépondreSupprimer